Communiqués

2 novembre 2010

AMIANTE environnemental

Le sol de la Haute-Corse est très riche en amiante.

Ce minéral est responsable de maladies spécifiques.

Jusqu’à présent pratiquement seul l’amiante industriel a bénéficié de mesures réglementaires destinées à protéger la santé des populations.

Depuis 1996, l’association U Levante, avec d’autres, réclame inlassablement que les travailleurs en terrains amiantifères soient mieux protégés, que les déblais soient considérés comme des déchets dangereux. Depuis 1996 les autorités nous traitent d’extrémistes, d’alarmistes, etc.

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail s’est cependant penchée pendant deux ans sur ces affleurements naturels d’amiante et un rapport « explosif » est prêt depuis début 2010… mais il n’est pas communiqué.

Le journaliste Jean-Charles Chatard a réussi à se le procurer.

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Bien entendu, les fibres d’amiante d’origine « environnementale » sont aussi dangereuses que les fibres d’origine industrielle. Toutes les populations vivant à proximité d’affleurements naturels de roches amiantifères sont des populations à risque. Le risque est accru si des matériaux sont mobilisés par des travaux (terrassements, etc). Dans certains villages de Corse les risques sont très élevés.

La constructibilité sur ces terrains est à proscrire et les déblais doivent entrer dans la catégorie des déchets dangereux.

Extraits :

« Pour des populations rurales vivant sur ou à proximité de sites géologiques naturel d’amiante … des incidences élevées de mésothéliomes (un des indicateurs spécifiques de l’exposition aux fibres d’amiante) ont été observés …

Sur la base des études présentées et des dernières conclusions scientifiques sur l’exposition environnementale à l’amiante, il s’avère que des risques potentiels de pathologies liées à l’amiante sont envisageables pour les populations à proximité d’affleurements naturels non exploités à l’échelle industrielle mais pouvant être modifiés par l’activité humaine. Le risque intervient, ou est accru, si des matériaux sont mobilisés/utilisés localement : aménagement du territoire (construction, voiries, revêtements, etc.), utilisation d’enduit tel que le pö ou le luto, fabrication d’objets domestiques, etc.

2 - Concernant la situation de la Haute-Corse, des données épidémiologiques sont disponibles pour la région Nord-Est de la Corse, région riche en dépôt d’amiante où était située la mine de Canari fermée en 1965. En 1993, a priori sans qu’il y ait eu d’exposition professionnelle identifiée pour les populations de cette zone, une étude a décrit en détail 14 cas de mésothéliome chez des patients ayant passé leur enfance en Corse du Nord- Est (villages éloignés de la mine de Canari) et dans la ville de Bastia. Les auteurs ont présenté leur étude comme un indice fiable en faveur de risques sanitaires à proximité d’affleurements naturels, en estimant autour de 10 cas pour 100 000 habitants l’incidence annuelle du mésothéliome dans cette région de Corse.

A Murato, village du Nebbio construit sur une zone d’affleurement naturel d’amiante en Corse du Nord-Est, 41 % de la population des plus de 50 ans examinés présentaient des plaques pleurales. Dans cette commune, la concentration massique en fibres trémolitiques est 40 fois plus élevée à l’intérieur des habitations que dans le village contrôle (44 ng/m3 à Murato contre 1 ng/m3 à Vezzani) et les concentrations à l’extérieur sont presque 200 fois supérieures dans la commune de Murato (72 ng/m3 à Murato contre 0,4 ng/m3 à Vezzani).

Une étude transversale a montré une prévalence de plaques pleurales trois fois supérieure à la Corse du Nord-Ouest qui est une région granitique. D’après une seconde étude, le pourcentage de patients avec plaques pleurales nés dans des villages avec dépôts d’amiante, est proche de 95% contre 58% pour les villages « contrôle ». …

Concernant les communes de Bustanico et de Murato, l’excès de risque individuel moyen lié à une exposition continue vie entière à des niveaux de 2,6 à 5 f/L d’amphiboles serait pour le mésothéliome de l’ordre de 1,2 à 2,2 10–3 pour un homme et de 1,9 à 3,6 10–3 pour une femme et pour le cancer du poumon d’environ 3 à 5,7 10–4 pour un homme et 0.6 à 1,1 10–4 pour une femme. Concernant la commune de Bastia, l’excès de risque individuel moyen lié à une exposition continue vie entière à un niveau de 1,3 f/L de chrysotile serait pour le mésothéliome de l’ordre de 2 10–4 pour un homme et d’environ 3,4 10–4 pour une femme et pour le cancer du poumon de l’ordre de 1,5 10–4 pour un homme et d’environ 0,29 10–4 pour une femme.

… les valeurs d’empoussièrement constatées lors de travaux de terrassements laissent supposer une très forte exposition du personnel employé à cette tâche si des mesures ne sont pas prises pour éviter les envols de fibres. La gestion des déblais produits est particulièrement sensible puisqu’elle est susceptible de contaminer l’environnement en faisant encourir un grave danger aux populations voisines des dépôts.

Des moyens devraient être apportés pour que les particularités régionales soient mieux prises en compte (par exemple en Corse : prévalence des cas rapportée au seul département de la Haute-Corse, et non à la région entière puisqu’il n’y a pas de cas en Corse du Sud). En cela, le projet de déclaration obligatoire des mésothéliomes apportera des informations utiles.

Compte tenu des informations disponibles actuellement sur l’amiante, en plus des travailleurs pouvant être fortement exposés (ex. : par le terrassement), la priorité devrait également être donnée aux mesures permettant la prévention ou la réduction de l’exposition des populations vivant sur les zones amiantifères.

Lever les interprétations juridiques par des textes réglementaires (ex. : modification des textes en vigueur, nouvelles dispositions, etc.) ou non (ex. : circulaires pour des interprétations officielles) assurerait pour les autorités compétentes concernées la possibilité d’actions de contrôle plus homogènes sur le territoire national et un poids plus important à la prévention des risques, notamment dans les domaines de l’urbanisme, de la réalisation de travaux de bâtiment et d’aménagement du territoire (BTP) et de la gestion des déblais et des déchets. Ces textes doivent être explicites, en intégrant des mesures spécifiques à la présence de terrains amiantifères. …

Actions concernant l’aménagement du territoire

La restriction d’accès aux sites amiantifères reste la mesure prioritaire à envisager soit définitivement, soit dans l’attente d’un recouvrement. Cette mesure doit s’appliquer en premier lieu aux sites sensibles comme les établissements recevant du public, les terrains largement fréquentés par le public (aires de jeux, camping, etc.), les zones présentant des affleurements d’amiante à nu et les carrières de roches contenant de l’amiante.

Ainsi, au niveau des communes, la présence d’amiante en zones urbanisées et proches d’agglomérations ou d’habitations, doit être intégrée aux documents d’urbanisme. Il serait souhaitable de définir, en fonction du risque lié aux terrains amiantifères, des modalités de limitation de la constructibilité en zone d’affleurements par l’insertion des informations sur les terrains amiantifères dans les documents d’urbanisme et l’incitation à la modification de l’implantation des projets, afin d’éviter autant que possible les travaux de terrassement portant sur les affleurements amiantifères. De même, il est également important que la présence de terrains amiantifères puisse être un critère (de réserve, voir de refus) supplémentaire dans l'élaboration des documents d'urbanisme et dans la délivrance des permis de construire. Ces mesures doivent en priorité concerner les zones d’agglomération à forte densité, comme par exemple la ville de Bastia.

Gestion des remblais et déchets

Compte tenu du recul scientifique acquis sur les risques potentiels associés à la mobilisation de grandes quantités de matières amiantifères, les déblais et les déchets doivent être considérés et gérés de manière appropriée et spécifique (en protégeant les opérateurs et en confinant les matières non utilisées contenant de l’amiante) dès la conception du chantier puis lors des phases d’excavation, de conditionnement, d’emballage, de transport et de stockage.

Une analogie importante est envisageable avec les mesures de gestion déjà en vigueur pour les déchets issus de matériaux contenant de l’amiante. A ces fins, il serait souhaitable de clarifier la réglementation en définissant de manière explicite les conditions de traitement des déblais extraits des terrains amiantifères. Il pourrait par exemple être question de leur place dans la classification des déchets dangereux, comme peuvent l’être, à pourcentage équivalent, les matériaux industriels contenant de l’amiante.

… Ces déblais résiduels doivent être acheminés vers des centres de stockage de déchets spécifiques à identifier et à aménager et dont le statut juridique reste à définir. »

U Levante

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